Bernard Lecomte poursuit son travail sur les secrets du Vatican et revient sur Pie XII.
Poursuivant son travail sur les « secrets du Vatican », et plus précisément sur les questions qui alimentent les polémiques contre la papauté, Bernard Lecomte revient, dans son dernier ouvrage, sur la question Pie XII.
Avec toujours la même clarté, l’auteur s’intéresse aux travaux archéologiques menés sur ordre de Pie XII autour de la tombe de Saint-Pierre, sur l’influence de sœur Pascalina, sur les relations du pape Pacelli avec de Gaulle au moment de l’épuration du clergé français, sur les filières ecclésiastiques d’exfiltration des nazis en 1945 et enfin sur la pièce « Le Vicaire ».
Les deux dernières questions sont, on s’en doute, les plus délicates. Bernard Lecomte les traite avec recul et objectivité. Sur les filières ecclésiastiques, il ne cache rien de la responsabilité de prêtres et autres prélats qui, soit par convictions anticommunistes soit par tradition d’accueil et de sauvetage, ont permis à des nazis ou à certains de leurs collaborateurs d’échapper à la justice des Alliés. La figure de Mgr Hudal domine bien évidemment ces activités souterraines. Mais force est de constater, à l’instar de toute l’historiographie, que Pie XII n’y est pour rien. Là aussi, on est en pleine désinformation. Quant à la pièce de théâtre d’Hochhuth, Bernard Lecomte n’a aucun mal à en démonter les mensonges et son caractère propagandiste, à mettre en avant le rôle d’Erwin Piscator, ainsi que le contexte du Concile (point sur lequel nous insisterons davantage, en liaison avec la volonté soviétique d’empêcher une condamnation du communisme). Il finit même par un douloureux et vrai constat, celui de la réussite complète de cette œuvre de désinformation.
Les pages sur sœur Pascalina, pleine d’anecdotes savoureuses, feront les délices des lecteurs. Celles sur la tombe de Saint-Pierre les éclaireront sur l’audace et la modernité de Pie XII. Enfin, celles consacrées aux négociations franco-vaticanes sur le renouvellement de l’épiscopat français d’après-guerre leur en apprendront beaucoup sur les capacités de négociations du pape, aidé dans sa tâche par le nonce à Paris Mgr Roncalli (futur Jean XXIII), dont les rondeurs cachent de stupéfiantes qualités de manœuvre et de fermeté.
A notre avis, Bernard Lecomte fait œuvre utile en permettant à un public très large d’apprendre et de comprendre les subtilités du monde pontifical, au-delà des légendes et des fantasmes. Réussira-t-il à convaincre ? Il est vrai qu’il résume la difficulté par une excellente formule : « Pie XII, comme tout personnage conflictuel passé à la moulinette des médias, ne peut être qu’un héros ou un salaud. Il sera donc, pour une partie de l’opinion, un salaud. ».
Bernard Lecomte, Les derniers secrets du Vatican, Paris, Perrin, janvier 2012, 334 p., 21 €