Attitude de Pie XII face au nazisme (3/4)

Quelle fut l’attitude du cardinal Eugenio Pacelli /Pie XII, germanophile reconnu, face au nazisme ? Sa phobie du communisme l’amena-t-il sinon à soutenir du moins à laisser faire, implicitement ou explicitement, le national-socialisme ? Comment Pie XII était-il perçu par les nazis ?

3) Pie XII, un pape face au nazisme ?

Le 2 mars 1939, le cardinal Pacelli succède à Pie XI et choisit la continuité avec son prédécesseur en choisissant Pie XII comme nom de pape. Les premiers mois de son pontificat sont consacrés à l’effort de paix : en mai, il propose une conférence internationale. Le pacte germano-soviétique du 23 août 1939 achève la précipitation vers la guerre, malgré une ultime tentative du pape le lendemain, lors d’une objurgation publique et solennelle : « Rien n’est perdu par la paix, tout peut être perdu par la guerre. » Cette déclaration officielle ne trouve aucun écho. Il prononce un nouvel appel le 26 août : peine perdue. Les déclarations solennelles sont sans effets. Pie XII réalise combien sa parole n’a que peu de portée quand elle cherche le bien et à quel point elle peut créer des dégâts sérieux si elle condamne un mal (cf. point suivant sur la position officielle du Vatican pendant la guerre). La guerre est déclarée dès le 1er septembre suivant par l’invasion de la Pologne par les Allemands, entraînant par la même occasion l’entrée en guerre de l’Angleterre et de la France.

¤ Moyens à la disposition de Pie XII

Avant de nous intéresser aux propos même de Pie XII, il convient d’abord de préciser quels étaient les moyens dont disposait Pie XII pour s’exprimer. L’historien Jean Chélini, président de l’Académie de Marseille et auteur de deux ouvrages de référence à ce sujet, rappelle que l’Europe, dès 1940, est sous le contrôle nazi : l’Autriche, la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Prusse orientale, la Hollande, la Belgique et la France ont été envahies par les Allemands. L’Italie, la Hongrie et la Bulgarie se sont alliées au Reich. Seule l’Angleterre, isolée, continue la lutte. De fait les moyens pour le pape de parler et d’agir sont limités.

Il ne dispose que de deux organes bien définis : l’Osservatore Romano et Radio Vatican. Le premier est censuré dès juin 1940 par Mussolini, lors de l’entrée en guerre de l’Italie ; le second n’a qu’une portée limitée. La voie diplomatique semble la seule possible officiellement, alors même que les nazis décryptèrent rapidement les codes secrets du Vatican. Son caractère excellant dans ce domaine et la nécessité le poussant à utiliser cette voie, c’est bien la diplomatie qui primera jusqu’à la fin de la guerre.*

La problématique est donc la suivante : les moyens dont disposait Pie XII étant limités, a-t-il pour autant toujours gardé le silence ? Ce n’est pas anticiper que de répondre par la négative. Mais il est certain que, à plusieurs reprises, il choisit néanmoins de se taire. Quelles en furent les raisons ?

¤ La position officielle du Vatican pendant la guerre

Malgré les pressions de toutes parts, Pie XII choisit de ne pas prendre parti pour un camp, en raison de la complexité de la situation. Il explique sa position au cardinal Michael Faulhaber dans un lettre datée du 31 janvier 1943 et caractérise son attitude pendant la guerre « par le mot impartialité et non par le mot neutralité », car ce dernier « pourrait être compris dans le sens d’une indifférence passive qui ne convient pas au chef de l’Eglise en face de pareils événements. Impartialité signifie pour nous : juger les choses selon la vérité et la justice. »

En 1946, Pie XII répète cette position devant le corps diplomatique, en précisant : « En aucune occasion, Nous n’avons voulu dire un mot qui fût injuste, ni manquer à Notre devoir de réprouver toute iniquité, tout acte digne de réprobation, en évitant néanmoins, alors même que les faits l’eussent justifiée, telle ou telle expression qui fut de nature à faire plus de mal que de bien, surtout, aux populations innocentes courbées sous la férule de l’oppresseur. »

L’attitude d’impartialité est donc très claire : si un acte est contraire à la vérité et à la justice, il est à condamner ; mais il convient de le faire avec la plus grande prudence, afin de ne pas accentuer les persécutions. Cette position est sans nul doute la plus délicate : certains trouveront certaines prises de position trop violentes et d’autres pas assez.

La répression qui suivit la courageuse protestation publique des évêques et pasteurs hollandais, le 26 avril 1942, est un argument de poids en faveur du pape qui, très tôt, a vu le danger d’un tel acte, non qu’il fût condamnable en soi, mais qu’il provoqua néanmoins l’intensification des persécutions par une arrestation et une déportation amplifiées.

¤ Quand Pie XII parle et agit…

Le 1er septembre, l’Allemagne envahit la Pologne. Pie XII enchaîne les condamnations :

– « Nous avons dû, hélas ! assister à une série d’actes inconciliables aussi bien avec les prescriptions du droit international qu’avec les principes du droit naturel et même les sentiments les plus élémentaires d’humanité. Ces actes exécutés au mépris de la dignité, de la liberté, de la vie humaine crient vengeance devant Dieu. » (Pie XII, Message de Noël 1939)

– L’Osservatore Romano condamne la persécution en Pologne en 1940. Menshausen, chargé d’affaires du Reich à Rome, rencontre Mgr Montini et lui reproche les ingérences du Vatican dans les affaires intérieures allemandes. L’épiscopat demande alors au pape de mesurer davantage ses paroles afin de ne pas aggraver la situation.

– La même année, le Vatican menace de rompre publiquement le silence sur l’aggravation de la situation religieuse dans la partie de la Pologne rattachée au Reich. La réponse est cinglante : « Si le Vatican menaçait ou même entreprenait d’agir contre l’Allemagne sur le plan politique ou celui de la propagande, le gouvernement du Reich ne manquerait ni de moyens matériels efficaces, ni de possibilités de prendre des mesures contre l’Eglise catholique. »

– Le 10 mai 1940, Pie XII envoie des télégrammes de condoléances aux souverains de Belgique, de Hollande et du Luxembourg à la suite de l’invasion de la Wehrmacht.**

– Le New-York Times du 25 décembre 1940 mentionne le message de Noël du pape et ne manque pas de signaler que « si le pape, dans son discours de Noël, a eu l’intention de condamner le régime hitlérien, il n’aurait pas pu le faire plus clairement qu’il ne l’a fait, en dénonçant “l’Ordre nouveau” qui prétend imposer sa loi à toute la société Le pape a expliqué que la morale politique repose sur la confiance, la fidélité dans les respect des traités. » Le journal américain est très clair : Pie XII est allé aussi loin que lui permettait le contexte politico-militaire.

– Le gouvernement général de l’ex-Pologne, dirigé par Hans Franck, instaure un véritable régime de terreur. Casimir Papee, ambassadeur auprès du Vatican (malgré la disparition de l’Etat polonais) et le gouverneur polonais en exil à Londres, demandent au pape une condamnation publique. Ce dernier est retenu par une partie de l’épiscopat resté sur place et craignant un redoublement des persécutions. Le pape choisit donc d’écrire personnellement et à plusieurs reprises aux évêques polonais afin de leur assurer son soutien indéfectible.

– Contredisant la prétendue indifférence du pape face aux persécutions perpétrées par les nazis, l’éditorial du 25 décembre 1941 proclame que « la voix de Pie XII est une voix solitaire dans le silence et les ténèbres qui engloutissent l’Europe en ce Noël 1941 ». Le contenu de cet éditorial explique de manière limpide que personne dans le monde, sauf le pape, n’ose s’élever contre le nazisme. Ce propos extrêmement fort ne peut donc pas être tranquillement mis de côté pour qui viendrait à s’intéresser à ce sujet.

– Le 31 octobre 1942, jour du 25e anniversaire des apparitions de Fatima, Pie XII adresse un message radiodiffusé au peuple du Portugal, pays neutre. Il fait la demande suivante à la Vierge Marie : « Aux peuples séparés par l’erreur et la discorde, et particulièrement à ceux qui professent pour Vous une singulière dévotion et chez lesquels il n’y avait pas de maison qui n’honorât votre vénérable icône (peut-être aujourd’hui cachée et réservée pour des jours meilleurs), donnez la paix et reconduisez-les à l’unique bercail du Christ, sous l’unique vrai pasteur. Obtenez à la Sainte Eglise de Dieu paix et liberté complètes ; arrêtez le déluge envahissant du néo-paganisme. » (Le Père Gaston Fessard se souviendra 15 ans plus tard de l’effet de ce texte : « Ceux qui vécurent l’angoisse de ces années d’occupation se rappellent sans doute eux aussi la signification que prirent pour nous ces phrases dont les nazis essayèrent par tous les moyens d’arrêter la diffusion. Tant il leur était clair d’abord qu’elles détruisaient radicalement leur propagande mensongère. C’est pour répandre la lumière et l’espoir que nous apportaient de telles paroles que je m’employai à composer un tract clandestin. »)

– Le 2 juin 1943, le pape ose toutefois une sortie sur la question polonaise : « le sort tragique du peuple polonais… le silencieux héroïsme de ses souffrances et sa place future sans une Europe refaite sur des bases chrétiennes et dans une assemblée d’Etats exempte des erreurs et des égarements du passé. » Ce texte est reçu avec ferveur par les Polonais, notamment par le cardinal Sapieha, archevêque de Cracovie, qui n’en demande pas plus par peur des représailles.

En 1940, suite à l’invasion de la Belgique, du Luxembourg et de la Hollande par l’Allemagne, Pie XII envoie trois télégrammes aux différents chefs d’Etat, qui, rendus publics, provoquent la colère de l’Allemagne et de l’Italie.

¤ Pie XII, entre Hitler et Staline ?

Lors de l’invasion de l’URSS par l’Allemagne, Pie XII choisit de ce taire, ce qui lui sera durement reproché. Plus généralement, Pie XII se voit accusé de silence à l’égard de l’Allemagne par peur du bolchevisme. C’est notamment la thèse que défend le film Amen de Costa-Gavras. Or une telle accusation est grave surtout lorsqu’elle est reprise en ces termes par un grand hebdomadaire français qui titre sa critique du film « Quand la croix était gammée » et qui tient ces propos : « Parce que “Hitler protégeait la chrétienté du communisme”, l’Eglise catholique a refusé de condamner pendant la dernière guerre le régime qui exterminait les Juifs. »3* La question de l’Eglise et des Juifs sera traité dans le chapitre suivant. Il convient pour le moment de considérer la thèse selon laquelle Pie XII aurait été clément vis-à-vis du nazisme – ce qui, nous l’avons pu en partie précédemment, est faux – pour faire barrage au communisme. Qu’en a-t-il été vraiment ?

Il faut tout d’abord rappeler que Pie XI publia, une semaine après Mit Brennender Sorge, le 19 mars 1937, Divini Redemptoris, dans laquelle est de nouveau condamné le communisme. Ces deux encycliques sont liées dans le sens où elles ont comme axe majeur l’analyse des natures idéologiques du national-socialisme et du communisme. Il apparaît une indéniable parenté entre les deux doctrines, qui poussera Pie XI puis Pie XII a les condamner sans cesse sans jamais attacher plus d’importance à l’une plutôt qu’à l’autre. Pie XI ira même plus loin avec la publication d’une ultime encyclique, le 29 septembre 1937 : Ingravescentibus malis. Si cette dernière porte sur le rosaire, Pie XI ne condamne pas moins les insultes dont la Vierge Marie est victime, ainsi que la propagande anti-communiste des nazis « qui prétendent qu’on peut ainsi repousser complètement les théories exécrables des communistes » mais qui « méprisant la lumière de la sagesse évangélique, (…) s’efforcent de faire renaître les erreurs des païens et leur manière de vivre. »

La problématique est donc la suivante : Pie XII a-t-il sinon encouragé du moins regardé avec bienveillance le nazisme dans sa lutte avec le communisme ?

Tout d’abord, il faut commencer par affirmer qu’il n’existe aucun texte, aucun discours ni même un bref télégramme de Pie XII qui pourrait accréditer la thèse d’un éventuel soutien à Hitler dans sa lutte contre Staline. Il y eut bien des craintes de la part d’un Wladimir d’Ormesson, ambassadeur de France près le Saint-Siège, mais vite dissipées (dans son rapport daté du 28 octobre 1940). Pour ne prendre qu’un exemple, lorsque les nazis passèrent à l’offensive en URSS, ils évoquèrent une « croisade » contre le bolchevisme : c’est le 22 juin 1941 qu’est lancée l’opération Barbarossa. Des pressions furent exercées sur le pape par les nazis pour qu’il la soutienne, ce qu’il refusa.

L’historien Yves-Marie Hilaire, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Lille III, s’est penché sur les procès-verbaux transmis au ministère des Affaires étrangères par les ambassadeurs de France successifs entre 1940 et 1944, à savoir Wladimir d’Ormesson et Léon Bérard. Ces documents sont évidemment une mine d’informations pour comprendre l’état d’esprit qui régnait au Vatican durant la guerre : « On y apprend qu’Hitler est considéré comme l’ennemi de la civilisation chrétienne et que le pape place tous ses espoirs dans la résistance britannique et l’aide américaine. Et surtout que l’attaque de l’URSS n’est en rien considérée comme une “croisade”. »4*

Voici quelques propos tenus par ces deux ambassadeurs :

– « Pour le Saint-Siège, le bolchevisme reste évidemment l’ennemi numéro un mais ceci ne le rend pas beaucoup plus indulgent pour le nazisme que l’on ménage parce qu’il est proche et qu’on le craint mais que l’on déteste. A cet égard, Mgr Tardini, qui appelle Hitler “Attila motorisé”, me confiait également qu’il considérait que l’Espagne comme l’Italie étaient plus que jamais en ce moment entre les mains de l’Allemagne. » (Wladimir d’Ormesson, le 24 juillet 1940, suite à une rencontre avec Mgr Tardini)

– « (L’attitude du Vatican) est très favorable à la Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, nettement hostile à l’Allemagne, encore plus à l’URSS, affectueuse et désolée envers l’Italie. (…) Le Saint-Siège redoute avant tout le triomphe total de l’Allemagne. Pour l’Europe, pour l’Italie, enfin pour l’Eglise. (…) Le Saint-Siège a cru que l’Angleterre avait des atouts pour une négociation après la défaite française. Quand il a vu la résistance britannique s’affirmer, se prolonger, il a pensé que la Grande-Bretagne pourrait peut-être sauver bien davantage encore, le Vatican a placé tous ses espoirs dans cette résistance et dans l’aide des Etats-Unis. (…) Pas la moindre trace de naziphilie au Vatican : Hitler est vraiment considéré comme l’ennemi de la civilisation chrétienne. C’est “Attila motorisé”, m’a dit un jour Mgr Tardini. » (Wladimir d’Ormesson, le 28 octobre 1940, lors de son rapport d’ensemble sur sa mission, après avoir été rappelé en France)

– « Le Saint-Siège aperçoit une opposition foncière, théoriquement irréductible, entre la doctrine de l’Eglise et celle dont s’inspire le national-socialisme. (…) Le Saint-Siège estime que le nazisme tel qu’il s’est manifesté au monde implique une confusion totale du temporel et du spirituel. Et là-dessus, l’Eglise ne saurait transiger qu’au prix de ce qui serait à ses yeux une abdication. Là-dessus l’accommodement équivaudrait pour elle à l’abandon d’une partie essentielle de sa doctrine et de sa mission… Le droit de l’Etat trouve une limite dans le droit de l’âme immortelle. (…) La parole du pape a rencontré une vive adhésion au cours de cette guerre (Allusion au message de Noël) » (Léon Bérard, le 22 février 1941, note adressée à l’amiral Darlan)

– « Un membre du Sacré-Collège a félicité le pape de ne pas avoir fait la moindre allusion à la guerre contre l’URSS lors de la remise de lettres de créance dy nouveau ministre de Roumanie. Le pape a répondu au cardinal : “Soyez sans crainte, je redoute Hitler encore plus que Staline.” Cette appréciation est d’autant plus remarquable que le danger communiste n’a jamais cessé d’être au premier plan des préoccupations du Vatican. » (Parole citée par Léon Bérard dans un rapport daté du 21 août 1941 – soit deux mois après l’invasion allemande en Russie -, destiné à l’amiral Darlan)

– « (Mgr Tardini) fait état de la déception des puissances de l’Axe, surtout en Italie du fait qu’aucune des paroles du Saint-Siège depuis deux mois ne contient pas une allusion à la “croisade” contre le bolchevisme. » (Léon Bérard, le 4 septembre 1941, rapport à l’amiral Darlan)5*

– « Au Vatican, on ne se fait guère d’illusion : en pleine guerre, le fait que le régime hitlérien observe si peu de ménagements à l’égard des confessions chrétiennes dans le Reich… est considéré comme une indication des mesures radicales qui seraient prises au lendemain d’une victoire. » (Léon Bérard, le 21 janvier 1942. Dans ce rapport, il rapporte également les propos de plusieurs diplomates allemands en poste à Rome : « Il n’y aura pas de place pour le Saint-Siège dans l’Europe de l’ordre nouveau » ; « On fera du Vatican un musée, aurait déclaré l’un d’eux et non des moindres. »)

– « (Au Vatican) on tient un compte minutieux des entraves et limitations que l’Allemagne a pu mettre aux liberté religieuses. » (Léon Bérard, le 2 février 1942, au maréchal Pétain)

Il n’y a donc pas eu d’obsession antibolchevique comme le laissent supposer certains historiens, telle Annie Lacroix-Riz qui affirme notamment que le Vatican était favorable à l’Allemagne depuis la Première Guerre mondiale.6*

Jean-Marie Mayeur souligne la limite des sources utilisées par celle-ci : « Mme Lacroix-Riz lit au premier degré des documents de diplomatie français qui sont, soit anticléricaux, soit proches de l’Action française. Ces diplomates se rejoignent dans leur attitude très nationaliste. Ils présentent Pacelli comme un allié de l’Allemagne, en songeant à son rôle lors de la tentative de paix de compromis de Benoît XV en 1917. En revanche, les diplomates allemands ne sont pas du tout convaincus que Pacelli leur soit favorable. (…) Bien sûr, pendant la Seconde Guerre mondiale, Pie XII ne voulait pas donner le sentiment que le Saint-Siège était contre le peuple allemand. Il a adopté la même attitude vis-à-vis du peuple russe. On doit rappeler que Pie XII est en contact avec la résistance allemande, via son secrétaire particulier, le père Leiber. Il est d’ailleurs à la limite des risques que peut prendre un pape. En 1943, Pie XII est contre la capitulation sans condition de l’Allemagne. Pourquoi ? Parce qu’il espère encore que la résistance pourra se débarrasser de Hitler et changer la nature du régime. Il pense aussi qu’une capitulation sans condition nourrit “l’énergie qui donne le désespoir”, prolongeant la guerre et les souffrances. Après l’échec de l’attentat du 20 juillet 1944, Pie XII ne songe plus à une paix de compromis. »7*

Lorsque les Etats-Unis entrent en guerre au côté de la Russie, une grave question se pose alors aux catholiques : peuvent-ils vraiment s’allier avec les communistes ? Les évêques posent même la question au cardinal Maglione, secrétaire d’Etat de Pie XII, qui leur répond simplement que, si les papes ont condamné le communisme, ils n’ont jamais condamné la Russie : « Il n’y a rien contre le peuple russe », affirme-t-il.8* On est donc à l’opposé d’un barrage commun du Reich et de l’Eglise contre le bolchevisme.

  • Jean CHÉLINI, L’Eglise sous Pie XII, la tourmente 1939-1945 (Tome 1) et L’après-guerre 1945-1958 (Tome II).

Jean Chélini est président de l’Académie de Marseille, professeur à la faculté de droit et de science politique d’Aix-Marseille III, président du conseil scientifique de l’institut de droit et d’histoire religieuse d’Aix-en-Provence.

**Père Pierre BLET, Pie XII et la Seconde Guerre mondiale d’après les archives du Vatican, Perrin, 1997

3*Le Nouvel Observateur, 21-27 février 2002

4*Yves-Marie HILAIRE, Le Figaro, 26 février 2002 ; cf. Yves-Marie HILAIRE, Histoire de la papauté, Tallandier, 1996

5*Tous ces passages sont extraits des archives du ministère des Affaires étrangères, série Z, Europe – Saint-Siège 1939-1945.

6*Article dans le Monde diplomatique et en ligne sur le Réseau Voltaire.

7*Jean-Marie MAYEUR, « Les raisons du choix tragique assumé par Pie XII », In op. cit., n°10, mai 2002, pp. 31-32.

8*Actes et documents du Saint-Siège relatifs à la Seconde Guerre mondiale (5e volume)

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3 réflexions sur « Attitude de Pie XII face au nazisme (3/4) »

  1. Horbis

    Signalement d’erreur: 1946???

    "La répression qui suivit la courageuse protestation publique des évêques et pasteurs hollandais, le 26 avril 1946, est un argument de poids en faveur du pape qui, très tôt, a vu le danger…"

    Répondre
  2. Gérard Sassier

    Tous mes vifs compliments pour cette étude impartiale et sereine, bien charpentée et documentée, sur ce sujet à propos duquel nombre d’âneries, plus ou moins fantaisistes, sont formulées ici et là sans aucune réflexion.

    Répondre

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